Pouvez-vous nous parler de la programmation de la sieste musicale
Je ferai écouter des œuvres méconnues de compositrices italiennes, françaises et allemandes en racontant leur histoire. Ces femmes, Maddalena Casulana, Francesca Caccini, Barbara Strozzi, Isabella Leonarda, Elisabeth Jacquet de la Guerre notamment, ont été exclues de la musique baroque.
Les plus belles pages de la musique baroque ont été écrites dans les couvents.
Quelle est la particularité de ces femmes ?
Elles étaient soit religieuses soit nobles. Beaucoup rentraient dans les Ordres pour avoir une certaine liberté de composer. Les plus belles pages de la musique baroque ont été écrites dans les couvents. Elles sont toutes dotées d’une grande intelligence. Elles font preuve d’une virtuosité et de nouveauté dans leurs œuvres ainsi que d’une grande détermination pour poursuivre leur travail malgré les nombreux obstacles qui se présentaient pour les empêcher de pratiquer la musique.
Pouvez-vous nous en dire plus sur le contexte dans lequel elles ont évolué ?
Nous sommes entre le XVIe et le XVIIIe siècle. La Renaissance a enrichi la musique de nouvelle sonorités et orchestration. La formation était interdite aux femmes. Elles n’avaient pas le droit de jouer d’un instrument de musique. La polyphonie était également interdite par l’Église. Certaines sœurs introduisaient des instruments dans les couvents et se cachaient pour chanter. Ces femmes étaient souvent isolées et déshonorées.
Leur travail était-il reconnu par leurs contemporains ?
Certaines étaient célèbres à leur époque. Élisabeth Jacquet de la Guerre, par exemple, est la première femme dont l’œuvre est jouée à l’Académie royale de musique et bénéficie de la protection de Louis XIV. Francesca Cassina reçoit des commandes des Médicis.
Certains couvents en Italie ont acquis une grande renommée grâce aux œuvres des femmes. Puis, l’Histoire écrite par des hommes n’a retenu aucun des répertoires de ces compositrices.
À 13 ans, si j’avais connu l’existence de Rosetta Tharpe, j’aurais pris une guitare.
Vous avez écrit un livre Les femmes musiciennes sont dangereuses, qu’est-ce qui vous a poussé à faire ce travail ?
Je suis intéressée par la musique depuis l’enfance. J’ai commencé à prendre des cours de guitare en 2014, en secret car je n’assumais pas. Même quand j’étais plus à l’aise techniquement, je me sentais illégitime. La musique est le domaine des arts et de la culture le moins féminisé et qui véhicule le plus de stéréotypes de genre. À 13 ans, si j’avais connu l’existence de Rosetta Tharpe, j’aurais pris une guitare. J’ai commencé à travailler sur ces biographies de femme pour comprendre les obstacles qu’elles ont rencontré. J’ai découvert un monde incroyable et cela m’a déculpabilisé de ne pas avoir commencé avant : j’avais juste 4 000 ans de conditionnement sur les épaules.